comme s’il mâchonnait quelque chose. Le souper fini, on se quitta presque immédiatement.
— Sais-tu bien que ton oncle est un drôle de corps, dit Bazarof, qui s’était assis sur le lit d’Arcade et fumait une pipe très-courte. Quelle élégance à la campagne ! c’est vraiment curieux. Et ses ongles donc ? On pourrait les envoyer à l’exposition.
— Tu ne sais pas, répondit Arcade, qu’il a été un lion dans son temps. Je te conterai un jour son histoire. C’était un homme charmant ; il tournait la tête à toutes les femmes.
— C’est donc ça ! il se rappelle encore le bon temps. Malheureusement, il n’y a pas de conquêtes à faire ici. Je ne me lassais pas de le regarder ; a-t-il de drôles de cols ? On les dirait de marbre ; et comme son menton est bien rasé ! Arcade Nikolaïtch, sais-tu bien que tout cela est fort ridicule ?
— Je le veux bien ; mais il n’en est pas moins un excellent homme.
— Une véritable antiquaille ! Quant à ton père, c’est un brave homme. Il a tort d’aimer à lire des vers, et ne doit pas entendre grand chose à l’agriculture ; mais c’est un bon diable.
— Mon père est un homme rare.
— As-tu remarqué qu’il était tout embarrassé ? tout timide ?
Arcade leva la tête, comme s’il n’était pas timide lui-même.
— Quelles drôles de gens, reprit Bazarof, que tous