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avec quelque surprise, mais non sans intérêt, s’empressa de tirer de sa poche un porte-allumettes en argent, et chargea Pierre de le remettre à Bazarof.

— Veux-tu un cigare ? lui cria de nouveau Bazarof.

— Volontiers, répondit Arcade.

Pierre lui rapporta avec le porte-allumettes un gros et noir cigare qu’Arcade se mit immédiatement à fumer et dont l’odeur était tellement forte, que Kirsanof, n’ayant jamais fumé de sa vie, détournait involontairement le nez, tout en cherchant à cacher ce mouvement à son fils pour ne point le contrarier.

Un quart d’heure après, les deux équipages s’arrêtaient devant le péristyle d’une maison de bois, encore neuve, dont les murs étaient peints en gris, et le toit, de fer, en rouge. C’était Marino, autrement dit la « Nouvelle Ferme, » ou encore la « Maison des Orphelins, » comme l’appelaient les paysans.


IV


L’arrivée des maîtres n’attira point sur l’escalier une foule de dvorovi, ainsi que cela se voyait autrefois ; une petite fille d’une douzaine d’années parut à la porte, et bientôt après se montra un jeune gars, ressemblant beaucoup à Pierre, et portant une veste de livrée grise, aux boutons blancs et armoiriés ; c’était le domestique de Paul Petrovitch. Il ouvrit silencieusement la portière de la calèche, et détacha le tablier