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dames instruites de la terre ne valent pas seulement votre coude.

— Vous ne savez qu’inventer ! dit Fenitchka à voix basse et en se serrant les bras contre le corps.

Bazarof releva le livre.

— C’est un livre de médecine, dit-il ; pourquoi l’avez jeté par terre ?

— Un livre de médecine ? répéta Fenitchka en se tournant vers lui. Vous rappelez-vous que vous m’avez donné des gouttes ? Eh bien, depuis ce temps-là, Mitia dort comme un charme. Combien je vous suis reconnaissante ! vous êtes si bon ! vrai !

— À la rigueur, tout médecin devrait être payé, reprit Bazarof en souriant ; les médecins, vous devez le savoir, sont des gens intéressés.

Fenitchka regarda Bazarof ; le reflet blanchâtre qui éclairait le haut de sa figure donnait à ses yeux une teinte encore plus foncée. Elle ne savait s’il parlait sérieusement ou s’il plaisantait.

— Avec plaisir ; lui répondit-elle ; mais il faudrait en parler à Nicolas Petrovitch…

— Vous croyez donc que je veux de l’argent ? reprit Bazarof ; non, ce n’est pas de l’argent que je vous demande.

— Quoi donc ?

— Quoi ? répéta Bazarof ; devinez ?

— Est-ce que je sais ?

— Dans ce cas je vais vous le dire ; je voudrais avoir… une de ces roses.