— Pourquoi donc, papa, je t’en prie ?
— Ton ami va passer quelque temps chez nous ; c’est embarrassant…
— Si c’est pour Bazarof, tu aurais bien tort. Il est au-dessus de tout cela.
— Pour toi aussi, reprit Kirsanof ; malheureusement l’aile de la maison n’est pas en bon état.
— Voyons, voyons, papa ; tu sembles chercher à t’excuser ; comment n’as-tu pas conscience ?
— Oui, sans doute, je devrais me faire conscience, ajouta Kirsanof qui rougissait de plus en plus.
— Allons donc ! mon père ; je t’en supplie ! — lui dit Arcade en souriant avec aménité. « Quelle idée de s’excuser de ça ! » se dit le jeune homme ; et tout en pensant ainsi, une tendresse indulgente pour la bonne et faible nature de son père, jointe à je ne sais quel sentiment de secrète supériorité, s’éveilla en lui. — N’en parlons plus, je t’en prie, ajouta-t-il en jouissant involontairement de cette indépendance d’esprit qui l’élevait si haut au-dessus de toute espèce de préjugés.
Kirsanof, qui continuait à se frotter le front, le regarda une seconde fois à travers ses doigts, et se sentit comme piqué au cœur… Mais il ne tarda pas à s’accuser lui-même.
— Voici nos champs qui commencent, dit-il après un long silence.
— Et ce bois là, en face, ne nous appartient-il pas aussi ? demanda Arcade.