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I. 18 · MEMOIRESfit comprendre que l’industrie des ruches ne lui réussissait pascomme au voisin. La veille de mon départ, comme nous devisions sur ceci et sur cela, il eut tout naturellement occasion de me dire : Est-ce que tu as une terre, bârine ?. — Oui. · — C’est loin d’ici’ !. — Cent verstes. ’ — Est-ce que tu habites ta terre ? — Oui, quelquefois. ’ — Mais tu aimes mieux te donner de l’air le fusil à la main, n’est-ce pas’ ? — La chasse est ma joie. — C’est au mieux ; tire le plus possible le coq de bois et le coq de bruyère, cela va aux estomacs de chasseurs et on accommode ces oiseaux-là partout ; mais là-bas sur ta terre, crois-moi, change souvent, souvent, l’at1cien de ton village. ·· ’ Le quatrième jour, vers le soir, M. Poloutykine, de retour de la ville, m’envoya un messager ; j’eus du regret de quitter le vieillard ; je dis un cordial adieu à Khor, à Fédia et à la famille, et je me mis dans la télégue avec Kalinytch. Il fera beau demain, lui dis-je, en regardant le ciel qui était fort clair. —Non, il-pleuvra, me répondit-il ; le canard s’éloigne à grands coups d’aile des endroits découverts, et l’herbe a une forte senteur. ··. Nous entrions dans un taillis.... Kalinytch chantonnait, tout cahoté qu’il était sur l’arbre du chariot, et toujours son regard se reportait au couchant. g Le lendemain, je quittai le toit hospitalier de M. Poloutykine.