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ZM MEMOIRES

a, pour s’occuper de l’économie domaniale, un bourmistre ou bailli choisi parmi ses paysans ; c’est un homme dont la barbe finit avec son touloup, juste au genoux. Quant à l’économie domestique, le soin en est confié à une vieille femme qui porte pour coilïure un mouchoir de soie à personnages, bien serré sur la tête ; rien de ridé et d’ingrat comme cette figure-là. Dans les écuries de Mardari Apollouytch sont nourris trente chevaux d’encolures différentes. Le maître fait usage pour ses courses d’une calèche bâelée par ses charrons, ses menuisiers et ses peintres à lui ; elle est, solide, mais elle pèse cent cinquante quintaux. Ou conçoit qu’une telle patache mange beaucoup d’avoine. M. Stégounof reçoit ses visiteurs avec des acclamations et des embrassades, et les régale trèscorclialement, trop cordialement ; grâce aux propriétés ahurissantes de la cuisine russe, il prive d’emblée son monde de la faculté de pouvoir se livrer, de toute la soirée, à aucune autre occupation qu’à une partie de préférence. Lui-même ne s’occupe jamais de rien ni matin ni soir. et il a même renoryé à son habitude de lire son sonnikk Comme nous comptons encore dans notre ’chère Russie un trop grand nombre de seigneurs terriers taillés sur ce patron, je dois, à ce qu’il me semble, prévoir qu’on me demandera à quel propos je me suis mis à décrire un Mardari Apollonytch ; en bien, le fait est que je me mourais d’envie de raconter une visite toute récente que je lui•ai faite. Nous sommes en été, j’arrive chez lui à sept heures du soir ; les vépres venaient de finir ; il. rentrait, il s’était fait accompagner par le prêtre, qui était un jeune homme fort timide, et qui avait quitté depuis un au à peine les bancs de son séminaire ; je trouvai cet ecclésiastique assis près de la ’ porte du salon sur l’angle d’une chaise. Marclari Apollonyteh j me fit comme toujours un accueil des plus chauds ; c’est un j homme très-bou, très-cordial, et à qui toute visite fait un ’ plaisir réel qu’il n’a pas à feindre et ne sait pas dissimuler. Le prêtre se leva et me regarda.

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I. Sonnik, interprète des songes, l’un des plus sots livres qu’ait \ jamais produits l’onirocritie..,