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son frère. Elle ne contenait que quelques lignes écrites dans le premier élan de sa joie. Volinzoff informait sa sœur qu’il avait fait sa demande à Natalie, qu’il avait son consentement et celui de sa mère. Il promettait d’en écrire plus long par le prochain courrier et, en attendant, il saluait et embrassait toute la colonie. Le décousu de sa lettre annonçait bien évidemment la joie la plus profonde, l’émotion la plus vive.

Bassistoff s’assit et on apporta le thé. Les questions tombaient sur lui comme de la grêle. Pigassoff même prenait part à la joie que causait la nouvelle dont le jeune homme était porteur.

— Donnez-moi, je vous prie, demanda Lejnieff entre autres choses, quelques détails sur un certain Karchagine dont le nom est parvenu jusqu’ici. Les bruits qui ont couru à son sujet étaient entièrement faux, n’est-il pas vrai ?

Ce Karchagine, dont nous n’avons pas encore eu le temps de nous occuper, était un beau jeune homme, un dandy, fort satisfait de son individu et plein de son importance. Il se donnait de grands airs, qu’il croyait pleins de majesté. Il avait l’air de sa propre statue érigée par souscription nationale.

— Ces bruits avaient un fondement réel, répliqua Bassistoff en souriant. Daria a été fort engouée de ce monsieur, mais Natalie ne voulait pas en entendre parler.

— Mais je le connais ! interrompit Pigassoff ; c’est un imbécile fieffé, un fat des pieds à la tête. Miséricorde !