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Allons n’en parlons plus. C’est fini. Le voilà bien mort et enterré… n’est-ce pas ? Je te reconnais, du moins. J’étais toute déconcertée. Eh bien ! embrasse-moi, sage et chère enfant.

Natalie porta la main de Daria à ses lèvres et Daria embrassa le front incliné de sa fille.

— Écoute toujours mes avis, n’oublie pas que tu es une Lassounska… et ma fille, ajouta-t-elle. Sois heureuse. Tu peux te retirer maintenant.

Natalie sortit en silence. Daria la suivit des yeux en se disant : « Elle me ressemble, elle aussi souffrira par le cœur, mais elle sera moins expansive que moi. » Et Daria se plongea dans des réminiscences du passé… d’un passé fort lointain… Puis elle fit appeler mademoiselle Boncourt et resta longtemps enfermée avec elle. L’ayant renvoyée, elle demanda Pandalewski. Elle voulait absolument savoir la véritable raison du départ de Roudine. Il va sans dire que Pandalewski la tranquillisa complètement. C’était dans son rôle. Le lendemain Volinzoff et sa sœur allèrent dîner chez Daria. Elle avait été toujours fort aimable pour eux, mais ce jour-là elle leur fit un accueil particulièrement bienveillant. Natalie se sentait prise d’une tristesse immense. Toutefois Volinzoff se montrait si respectueux envers la jeune fille, il entrait si timidement en conversation avec elle, qu’elle ne put s’empêcher de lui en être reconnaissante au fond du cœur. La journée avait été calme, même ennuyeuse ; mais, en