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pourrez plus douter de ma sincérité… Je veux, Serge Pawlitch, que nous nous séparions en amis… que vous me tendiez la main comme autrefois.

Et Roudine se rapprochait de Volinzoff.

— Excusez-moi, monsieur, répondit celui-ci en se retournant et en faisant un pas en arrière, je suis prêt à donner pleine créance à vos intentions ; admettons que tout ceci soit beau, même grand ; mais nous sommes dans ma famille des gens simples et nullement en état de suivre l’essor d’esprits aussi profonds que le vôtre… Ce qui vous paraît sincère nous semble impudent… ce que vous trouvez simple et clair, nous le trouvons embrouillé et obscur… Vous vous vantez de ce que nous cachons ; comment pourrions-nous nous comprendre ? Excusez-moi, je ne puis ni vous compter au nombre de mes amis, ni vous tendre la main… Il est possible que ma conduite soit mesquine ; qu’y faire ? Je suis mesquin moi-même.

Roudine avait pris son chapeau.

— Serge Pawlitch ! dit-il tristement, adieu ! j’ai été trompé dans mon attente. Ma visite est étrange, en effet, mais j’avais espéré que vous (Volinzoff fit un geste d’impatience)… Pardonnez-moi, je ne parlerai plus de cela. À tout prendre, je crois que vous avez certainement raison et que vous ne pouviez agir autrement. Adieu ! et permettez, au moins, que je vous assure encore une fois, que je vous assure pour la dernière fois de la pureté de mes intentions…