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hâte, descendit pour souhaiter le bonjour à sa mère, et profita du loisir qui lui restait pour aller seule au jardin.

La journée était chaude, claire et radieuse, malgré la pluie qui tombait par intervalles. Des nuages bas et vaporeux passaient légèrement dans le ciel bleu sans pourtant obscurcir le soleil ; de brusques et passagères ondées ruisselaient sur les champs. De grosses gouttes brillantes se succédaient rapidement avec un bruit sec, comme le ferait une averse de diamants ; le soleil se jouait à travers leurs réseaux étincelants, et l’herbe que le vent faisait ondoyer un instant auparavant avait cessé de frissonner pour aspirer avidement l’humidité ; les arbres chargés de pluie frémissaient avec langueur de toutes leurs feuilles ; les oiseaux poursuivaient leurs chansons, et leurs gazouillements babillards se mêlaient au bruit sourd et au murmure frais de l’averse qui s’éloignait. Les routes couvertes de poussière laissaient échapper une légère vapeur, et les gouttes d’eau rapprochées les bigarraient de capricieux dessins. Puis, dans un moment, le nuage se dissipe, un petit vent s’élève, l’herbe commence à se nuancer d’or et d’émeraude en se courbant au souffle de l’air. Les feuilles collées par l’humidité deviennent de plus en plus transparentes. Une senteur pénétrante s’échappe de toutes parts…

Le ciel était presque éclairci quand Natalie entra dans le jardin. La fraîcheur et le calme y régnaient, ce