— Pourquoi était-il resté à Moscou ? »
Fustow continuait à faire bourdonner sa roue.
— « Qui le sait ? Je me suis laissé dire qu’il a fait le métier d’espion pour les nôtres, mais ce pourrait bien être une fable. Ce qu’il y a de sûr, c’est que la couronne l’a indemnisé de ses pertes.
— Il porte un frac d’uniforme : par conséquent il sert ?
— Oui, il sert. Il est professeur à l’école des cadets, et a rang de conseiller aulique.
— Qu’est sa femme ?
— Une Allemande d’ici, la fille d’un charcutier… ou d’un boucher…
— Et tu le vois souvent ?
— Oui, je le vois.
— S’amuse-t-on chez lui ?
— Assez.
— A-t-il des enfants ?
— Certainement ; il a quatre enfants d’un second lit, avec un fils et une fille du premier.
— Quel âge a la fille aînée ?
— Elle peut avoir vingt-cinq ans. »
Il me sembla que Fustow s’inclinait plus profondément sur son tour, et que, sous les coups cadencés de son pied, la roue tournait plus vite et bourdonnait plus haut.
« Est-elle jolie ?
— Affaire de goût. Sa physionomie frappe, et quant au reste… c’est une personne remarquable.
— Ah ! ah ! » pensai-je.