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apparition, surgit du brouillard devant nous, puis nous vîmes émerger la seconde, la nôtre, et mon lévrier aboya, me reconnaissant probablement au flair.

Je frappai à la fenêtre. « Siméon ! criai-je au domestique de Téglew, eh ! Siméon, ouvre-nous vite la barrière. »

La barrière, poussée brusquement, frappa la palissade et se balança. Siméon enjamba le seuil.

« Élie Stépanitch, venez », dis-je.

Je me retournai…

Mais il n’y avait plus d’Élie Stépanitch derrière moi. Téglew avait disparu comme si la terre l’eût englouti.

Je rentrai dans la maison, tout ahuri.

XIII

Un vif mécontentement contre Téglew, contre moi-même, remplaça la consternation qui d’abord s’était emparée de moi.

« Ton maître est fou, dis-je brusquement à Siméon, positivement fou ! Il est allé au galop à Pétersbourg, puis il est revenu, et le voilà qui court à travers champs. Je l’ai rattrapé, je l’ai ramené jusqu’à la porte, et pst ! il s’est esquivé de nouveau. Par une semblable nuit, rester hors de la maison ! Il a bien pris son temps pour se promener ! — Et pourquoi ai-je lâché sa main, » me disais-je avec regret.

Siméon me regarda en silence, comme s’il voulait