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dire à Paul : il sera au courant de tout en un clin d’œil.

— Quel homme étonnant, ce Paul ! fit Marianne surprise.

— Oui, il est assez étonnant… Ainsi, quand il faudra vous marier avec Alexis, c’est encore lui qui arrangera tout avec Zossime… vous vous rappelez, ce pope dont je vous ai parlé… Mais jusqu’à présent, il n’en est pas besoin ? Non ?

— Non.

— Non ?… Eh bien ! non. »

Solomine s’approcha de la porte qui séparait la chambre de Néjdanof de celle de Marianne, et se pencha vers la serrure.

« Qu’est-ce que vous regardez ? lui demanda Marianne.

— Peut-on la fermer à clef ?

— Oui, elle ferme, » murmura-t-elle.

Solomine se retourna vers elle, elle tenait ses yeux baissés.

« Ainsi donc, dit-il joyeusement, il n’est pas besoin de savoir ce qu’ont résolu les Sipiaguine. C’est entendu ? »

Solomine fit un mouvement pour sortir.

« Solomine !…

— Que désirez-vous ?

— Dites-moi, je vous prie, pourquoi vous, toujours si taciturne, êtes-vous si causeur avec moi ? Vous ne pouvez pas vous figurer combien cela me fait de plaisir.

— Pourquoi ?… Solomine prit les mains douces et petites de la jeune fille, dans ses grandes mains dures. Pourquoi ? Mais probablement parce que je vous aime beaucoup. Adieu. »

Il sortit. Marianne, immobile et debout, le regarda partir, resta un moment pensive, puis s’en alla chez Tatiana, qui n’avait pas encore apporté le samovar ; elle prit, il est vrai, une tasse de thé, mais elle lava la vaisselle et pluma des poules, et peigna même la tignasse embrouillée d’un petit garçon.

À