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devez être fatigués tous les deux. Je vais m’occuper de la fabrique pour le moment ; nous nous retrouverons plus tard. Si vous avez besoin de n’importe quoi, demandez-le à Paul et à Tatiana. »

Marianne lui tendit vivement les deux mains.

« Comment vous remercier ? » lui dit-elle en le regardant d’un air attendri.

Solomine lui caressa doucement la main. « Je pourrais vous répondre que je n’ai pas mérité de remercîments… et ce serait vrai. Mais j’aime mieux vous dire que votre reconnaissance me fait grand plaisir. Comme ça, nous sommes quittes. Au revoir ! Allons, Paul ! »

Marianne et Néjdanof restèrent seuls.

Elle s’élança vers lui, et, le regardant comme elle avait regardé Solomine, mais d’un regard plus joyeux encore, plus attendri et plus lumineux :

« Ô mon ami, lui dit-elle, nous commençons une vie nouvelle… Enfin ! enfin ! tu ne saurais croire combien ce pauvre logement me paraît aimable et charmant, comparé à ces détestables palais ! Dis, es-tu content ? »

Néjdanof lui prit les mains et les serra sur sa poitrine.

« Je suis heureux, Marianne, parce que je commence cette nouvelle vie avec toi. Tu seras mon étoile conductrice, mon appui, ma force…

— Cher Alexis ! Mais pardon, il faut que j’aille mettre un peu d’ordre dans ma toilette. Je passe dans ma chambre, attends-moi ici. Je reviens à l’instant. »

Marianne passa dans la seconde pièce, tira la porte derrière elle, puis une minute après, entr’ouvrant la porte, et avançant la tête par l’entre-bâillement : « Qu’il est gentil, ce Solomine ! » dit-elle. Après quoi elle disparut de nouveau, et on entendit la clef tourner dans la serrure.

Néjdanof s’approcha de la fenêtre, regarda dans le