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— Avec cette jeune fille que vous avez vue ici aujourd’hui.

— Ah !… Elle a une bonne figure. Alors, vous vous aimez ? ou peut-être, tout simplement, vous avez décidé de quitter ensemble une maison où vous vous sentez mal ?

— Nous nous aimons.

— Ah ! — Solomine réfléchit un instant. — C’est une parente des maîtres de la maison ?

— Oui. Mais elle partage toutes nos convictions, et elle est prête à tout ! »

Solomine sourit.

« Et vous, Néjdanof, êtes-vous prêt ? »

Néjdanof fronça légèrement le sourcil.

« Pourquoi cette question ? Vous me verrez à l’œuvre !

— Je ne doute pas de vous, Néjdanof ; si je vous ai fait cette question, c’est que, à part vous, je suppose, personne n’est prêt.

— Et Markelof ?

— Oui, c’est vrai, il y a Markelof. Mais celui-là est né tout prêt, je m’imagine. »

En ce moment, quelqu’un frappa à la porte deux coups rapides et discrets. Puis on entra sans attendre de réponse. C’était Marianne. Elle marcha tout droit vers Solomine.

« Je suis sûre, commença-t-elle, que vous ne serez pas surpris de me voir ici à une pareille heure. Il vous a tout dit, naturellement. (Elle montra du doigt Néjdanof.) Donnez-moi votre main, et sachez que c’est une honnête fille qui est devant vous.

— Oui, je le sais, » répondit Solomine d’un ton grave.

Il s’était levé de sa chaise dès l’apparition de Marianne.

« Je vous regardais pendant tout le dîner, et je me disais : Quels yeux honnêtes elle a, cette demoiselle ! Néjdanof