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tion purement honorifique de maréchal de la noblesse. « Messieurs, dit-il ordinairement aux nobles électeurs qui viennent le pressentir à ce sujet (et il leur parle avec un air protecteur et digne), je suis sensible à l’honneur que vous me faites, mais j’ai voué mes loisirs à la solitude. » Et puis il balance sa tête de droite à gauche, et puis il plonge solennellement son menton et ses joues dans sa cravate.

Tout jeune, il fut attaché en qualité d’aide de camp à un très haut personnage qu’il ne désigne jamais que par son nom de baptême suivi du nom de baptême de son père. On prétend, qu’outre ses fonctions d’aide de camp, il remplissait d’office auprès de son général d’autres fonctions : que, par exemple, ayant revêtu son uniforme de parade et accroché tous ses crachats, il lavait son maître au bain. Mais allez donc prêter l’oreille aux méchants propos ! Khvalinsky s’abstenait de parler de son service ; il est vrai qu’il n’avait jamais fait campagne.

Il habite une toute petite maison et vit seul. Il n’a jamais connu les douceurs de l’état conjugal, circonstance à laquelle il doit de passer encore dans le pays pour un parti avantageux. En revanche, il a une ménagère, femme de trente-cinq ans, aux yeux noirs, grande,