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― Hé ! les babas ! cria-t-il en se levant. Ici ! les babas ! Et toi, Fedia, ne quitte pas le bârine. Les babas sont si bêtes !

Un quart d’heure après, Fedia, muni d’une lanterne, me conduisit dans le hangar. Je m’étendis sur le foin parfumé. Mon chien s’accroupit à mes pieds et Fedia me souhaita une bonne nuit, en fermant sur lui la porte du hangar. Je fus assez longtemps à chercher le sommeil. La vache approcha de la porte et souffla bruyamment par deux fois. Mon chien aboya contre elle avec dignité. Un porc succéda à la vache et vint en grognant d’un air absorbé ; puis un cheval se mit à broyer son foin en faisant retentir le choc de ses meules : il s’ébroua… à la fin, je m’endormis. À l’aube, Fedia vint me réveiller. Ce gars joyeux et dégourdi me plaisait fort. C’était, du moins me semblait-il, le favori de Khor. Le père et le fils ne cessaient presque pas de se plaisanter. Le vieillard fit quelques pas à ma rencontre. Était-ce parce que j’avais passé la nuit sous son toit, il me témoigna beaucoup plus de cordialité que la veille.

― Le samovar t’attend, me dit-il. Viens prendre du thé.

Nous nous assîmes à table. Une forte baba, l’une des brus du vieux Khor, apporta un pot