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― Kalinitch !

― Tout de suite, petit père ! répondit une voix, j’attache mes laptis[1]. Nous mîmes la carriole au pas et fûmes bientôt rejoints par un homme de quarante ans, haut de taille, maigre, la tête petite et déjetée en arrière. Il me plut aussitôt par l’air de bonté qui se jouait sur son visage hâlé et marqué de petite vérole. Kalinitch, comme je le sus plus tard, suivait chaque jour son bârine à la chasse ; portant sa gibecière ou son fusil, observant où se posait l’oiseau, allant puiser de l’eau fraîche, cueillant des fraises, élevant des tentes et conduisant la drojka. Sans Kalinitch, M. Poloutikine ne pouvait faire un pas.

Kalinitch était d’un caractère doux et enjoué ; il chantonnait sans cesse, regardant autour de lui sans soucis, parlait un peu du nez, clignait de ses yeux bleu pâle en souriant et caressait souvent sa barbe coupée en pointe. Il marchait à grandes enjambées sans paraître se hâter et s’appuyait légèrement sur un bâton long et mince.

Dans le cours de la journée, nous échangeâmes quelques paroles. Il me servait sans servilité,

  1. Chaussures de tilles tressées.