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ne sera pas facile avec lui, mais je verrai.

— Occupez-vous-en, petit oncle.

— C’est bien, je m’en occuperai. Seulement, toi, prends garde… Allons, allons, ne te justifie pas ; que Dieu soit avec toi, que Dieu soit avec toi ! Prends garde à l’avenir ; autrement, par Dieu ! Mitia, il t’arrivera malheur ! Par Dieu ! tu te perdras… Je ne pourrai pas toujours te porter sur l’épaule… Je suis d’ailleurs peu influent, moi-même. Et maintenant va-t’en avec Dieu.

Mitia sortit, Tatiana Illiinichna le suivit.

— C’est ça, maman gâteau, va bien vite lui donner du thé ! cria à sa suite Ovsianikov. Ce n’est pas un sot, savez-vous, Monsieur, et le cœur est très bon. J’ai peur pour lui… Du reste, pardon de vous occuper de ces vétilles.

La porte s’ouvrit, entra un petit homme à tête grise vêtu d’un paletot en velours.

— Ah ! Franz Ivanitch, s’écria Ovsianikov, salut ! comment va la santé ?

Permettez-moi, mon cher lecteur, de vous présenter ce personnage. Franz Ivanitch Lejeune, mon voisin, est parvenu à la condition de gentilhomme par une voie peu banale. Il naquit à Orléans de père et de mère français et vint avec Napoléon conquérir la Russie en qualité de tambour. Tout alla d’abord comme sur des