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Id., ibid. — Quand je te quitte, la nuit, ô amie maigre et mal logée, pour ne pas, dans l’escalier, me flanquer par terre, j’allume un bout de bougie.

Mais aussitôt dans la rue, je le jette. Les étoiles lointaines, alors, et la secrète Phoebé, éclairent seules ma route.

À mesure que je monte vers les hauteurs où, comme il sied à un poète, je demeure, je vois, comme un tapis qui se déroule, Alger se déployer à mes pieds, et le port, et la courbe du golfe murmurant.

Et, dans l’air, un frais parfum circule, qui me fait oublier celui de ton corps, ô maigre bien-aimée.

Paris, 189.. — Prahly me disait, tandis que la chambre s’emplissait d’ombre, et nos cœurs de cette mélancolie qui accompagne une joie trop longtemps différée : « Que de fois je l’ai souhaité, ce moment : depuis que j’étais toute petite. Et pourquoi avais-tu l’air de ne pas savoir ? »

Cependant, elle me pressait dans ses bras, qui furent autour de mon corps comme l’étreinte nombreuse d’un lierre. Et moi, je ressemblais plutôt à un ivrogne, la nuit, qui cherche, du bout de sa clef, une serrure perdue dans les ténèbres.

— Oui, Prahly, lui dis-je ; je me souviens de toi, quand tu étais toute petite, et que tu sautais sur mes genoux, en poussant des cris pareils à ceux de l’hirondelle.

Or, le soir, elle me força de dîner chez elle ; et, ayant fait venir sa petite fille, la suspendit vers moi, comme on offre une grappe très lourde, en disant :