s’étaient, deux mois avant, sauvés au premier coup de feu à Chatillon ; c’est un raisonnement comme un autre ; mais nous avons le droit de trouver qu’il pousse à la peau et nous en usons. — Récemment M. Ducrot a reçu de M. Thiers le commandement d’un de nos corps d’armée. — Son premier soin en entrant en fonctions, a été d’adresser à ses soldats un ordre du jour où il ne néglige pas de les préparer à l’idée qu’ils pouvaient avoir prochainement à taper sur « les ennemis de l’intérieur » — Dans un moment où la France entière, convaincue que son salut est dans l’apaisement des passions, évite avec le plus grand soin tout ce qui peut les exciter, l’ordre du jour sur le coin de l’oreille du général ducrot-de-pont-trop-court était une véritable merveille de patriotisme. — Profiter de l’instant où les partis suspendent jusqu’au bruit de leur respiration, afin de ne point troubler la patrie convalescente, pour crier d’une voix de stentor aux oreilles de la malade : garde à vô !… croisez !… ette !… c’est une trouvaille d’une délicatesse et d’un à-propos, que l’on ne peut vraiment attendre que des hommes de génie qui prennent la mesure de la largeur de la Marne sur celle du canal Saint-Martin.
Au physique, le général Ducrot répond exactement à l’idée que l’on peut s’en faire quand on a lu les lignes qui précèdent ; l’expression du visage est franche et ouverte. Il y a des gens qui trouvent qu’il a l’air bon et d’autres prétendent qu’il n’a pas l’air méchant. — Quand l’on a dit de lui que c’est un brave soldat, on répète que c’est un soldat très-brave ; si quelqu’un insiste et vous dit : Et puis ? on répond : Et puis… c’est un bien brave militaire !… — D’ailleurs, en le convoquant, comme pour les enterrements, à onze heures quand on a besoin de lui à midi, un commandant en chef pourrait encore en tirer quelque parti dans une bataille, surtout s’il avait pris ses mesures pour s’en passer.
NOTICE COMPLÉMENTAIRE
PAR LES COLLECTIONNEURS DU TROMBINOSCOPE
Le général Ducrot se voit proposer le... 18... le commandement en chef de la garde nationale réorganisée ; il refuse en répondant : C’est tous pochards !… Le... 18... il éprouve le besoin de s’adresser un nouvel ordre du jour à son corps d’armée ; et la tranquillité la plus parfaite régnant en France, il donne à entendre à ses soldats qu’ils doivent toujours être prêts à enlever des barricades. — Enfin, il meurt le... 19... à la suite d’une année de sécheresse qui a diminué d’un tiers la largeur de la Marne ; ses dernières paroles sont : Je savais bien que mon pont de bateaux était assez long !…
