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figuré sur la liste de ceux qui ont voté la mort de Louis XVI ; mais, en 1815, l’aïeul de M. Haussmann proteste, donna la preuve qu’il y avait eu erreur de nom au procès-verbal, et qu’il n’avait pas voté cette loi. Reste à examiner si ce n’est pas surtout après cette justification que le grand-père de M. Haussmann avait le plus besoin d’être justifié ; les opinions sont libres, mais pour nous c’est tout vu. Après avoir été quelque temps élève au Conservatoire de musique, — comme chanteur probablement, — M. Haussmann devint clerc de notaire et se fit recevoir avocat.

En 1830, il fut même un peu journaliste, et signa, comme rédacteur du Temps, la protestation contre les ordonnances de juillet qui ladmiraultisaient la presse ; c’était un bon mouvement ; mais M. Haussmann était à peine majeur, là est son excuse. — De 1830 à 1848, il fut sous-préfet de Nérac, de Saint-Girons et de Blaye. En 1847, il a été promu officier de la Légion d’honneur. — La révolution de 1830 avait commencé la fortune de M. Haussmann, celle de 1848 devait lui donner une nouvelle impulsion, et le coup d’État de 1851 était destiné à la compléter. C’est étonnant comme le changement de régime, qui tue net certains hommes, réussit à certains autres ; tout porte à croire que si les d’Orléans remontent sur le trône, M. Haussmann sera nommé quelque chose de plus que préfet de la Seine, et que plus tard, si Henri V nous est rendu (tais-toi, mon cœur !…) il sera fait archi-grand je ne sais quoi de la couronne. Le chiendent pousse partout.

M. Haussmann fut donc successivement préfet du Var, de l’Yonne et de la Gironde, et enfin, distingué par l’empereur, il fut nommé préfet de la Seine le 23 juin 1853 et commença cette fameuse transformation de Paris qui depuis fait, chaque été, la fortune des marchands de parasols blancs doublés de vert. Nous n’énumérerons pas tous les travaux accomplis par M. Haussmann. Les casernes furent surtout l’objet de sa vive sollicitude ; non-seulement il en bâtit un grand nombre, mais encore il sut les disposer avec tant de génie, qu’en cas d’émeute elles devaient, se combinant entre elles, la couper, en moins de dix minutes, en tronçons gros comme le poing. On voit que, par les soins de M. Haussmann et de son maître, Paris était, au point de vue stratégique, truqué comme le dessous d’un théâtre de féeries et que toutes les précautions étaient bien prises pour que l’empereur finît mollement ses jours aux Tuileries sur cinq matelas et huit lits de plume. L’avenir a d’ailleurs démontré une fois de