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jusque sur les élastiques du canapé impérial, les fabricants de vieux blasons se crurent obligés d’accomplir des prodiges pour lui fabriquer une généalogie à perte de vue, dont celle du pot au feu ne donnerait qu’une faible idée. — Vapereau, qui certainement est de bonne foi, donne pour ancêtres à la Montijo, les Porto Garrero, les Gusman, les Fernandez, les La Cerda et autres noms illustres qu’il convient, à notre avis, de remplacer sans se gêner par ceux non moins célèbres des Farceira, des Cascadez et des Blaguinos, dont l’assemblage peint beaucoup mieux l’état de notre âme en extase. — Avant d’aller plus loin et de descendre davantage, avec ses plus grosses bottes, dans cette étude biographique, l’auteur du Trombinoscope croit devoir répondre à certaines objections qui lui sont faites : Comment ?… lui a-t-on dit, vous ne respectez pas même les femmes !… — Pardon !… pardon !… il importe de préciser. J’ai ouï dire, et vous aussi sans doute, qu’une grande dame, une reine, s’il m’en souvient bien, répondit à ceux qui lui reprochaient de se mettre au bain devant ses domestiques : Un esclave n’est pas un homme !… Nous croyons être dans le cas de légitime défense et rien de plus, en considérant les impératrices comme des Auvergnats. J’ai dit.

Mademoiselle de Montijo passa une partie de sa jeunesse à voyager sous le nom de comtesse de Teba et les jupons de sa mère. Nota : Madame sa mère quittait ses jupons la nuit. — En 1851 elle parut aux fêtes de l’Elysée, qui devaient si vite la conduire à celui du pouvoir (pour les lecteurs du Constitutionnel : au fait du pouvoir). Elle ne tarda pas à s’y faire remarquer par sa grâce et le talent qu’elle avait de s’habiller avec presque rien. — Un soir, Napoléon III valsa avec elle. Elle était en corsage. (typographes ! pas de coquilles et ne me faites pas dire ce que je ne pense pas). Elle était donc en corsage, mais si peu… si peu… Napoléon III, comme toujours, portait une cotte de mailles ; le petit dieu malin trouva une fissure, et le lendemain Eugénie de Montijo était demandée en mariage par l’Empereur. — Elle avait alors vingt-sept ans ; en face d’une pareille proposition, les convenances exigeaient qu’elle rougit et baissât les yeux ; elle y parvint en rappelant les souvenirs de sa plus tendre enfance. — L’Empereur devenant pressant, elle demanda à consulter sa mère, et la chronique assure qu’elle eut assez de présence d’esprit pour refuser le denier à Dieu que l’Empereur lui demandait. De ce trait de génie dépendit, assure-t-on, son succès. — Son mariage fut célébré le 30 janvier 1853, à Notre-Dame ; la messe fut dite au maître-autel, la chapelle de la Vierge étant en réparations. — Le conseil municipal vota une somme de 600 000 fr. pour offrir une parure à la mariée ; elle refusa et voulut que ce crédit fût employé en charités, pensant avec raison qu’elle se rattraperait plus tard. — Elle s’installa brillamment aux Tuileries et à Saint-Cloud, commanda 871 robes, 3 255 chapeaux et le reste à l’avenant ; se composa une cour de dames d’honneur et régla le cérémonial de sa maison sur un pied de 30 millions