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dron à trente-et-un, lieutenant-colonel à trente-huit, général de brigade à trente-neuf, général de division à quarante-quatre, il fit avec succès la campagne d’Italie, et eut pour mission en 1866, de préparer un plan de réorganisation de l’armée. — Il publia en 1867 une brochure ayant pour titre : L’armée française en 1867 ; cet ouvrage fut très remarqué, et ce qui tendrait à prouver qu’il était remarquable, c’est qu’il lui valut, dit-on, une espèce de disgrâce auprès de la clique auguste qui dirigeait alors la France, et ne voyait dans l’armée de la nation, qu’un moyen de se faire cinq cent millions de rentes en inscrivant au budget des factures chimériques de boutons de guêtres et de bretelles de fusils. — Cette espèce de dégringolade dans l’estime du « cher seigneur » à Marguerite Bellanger, fut le point de départ de la fortune politique du général Trochu. Quand vinrent nos premiers désastres de 1870, Vélocipède père, moins soucieux des revers qu’il venait d’essuyer en Alsace que des pommes cuites qui l’attendaient à Paris, nomma le général Trochu gouverneur de la capitale, comme concession à l’opinion publique ; quelques-dissentiments entre le général d’une part, la régente et le Palikao de l’autre, achevèrent la popularité de M. Trochu ; et le peuple parisien, heureux d’avoir enfin à sa tête un homme qui refusait de se vautrer aux pieds d’une nonne douteuse et d’un maraudeur de chinoiseries, salua avec confiance — presque avec plaisir — l’avènement du nouveau gouverneur de Paris.

Les illusions des Parisiens ne furent pas de longue durée ; ils ne tardèrent pas à s’apercevoir que la prétendue indépendance du général était beaucoup plus de l’habileté que de l’honnêteté ; et lorsqu’éclata le 4 septembre, ils purent acquérir la preuve que si M. Trochu n’avait pas recommencé sur leur dos les mitraillades du 2 décembre, c’était moins par antipathie pour le régime pourri qui tombait, que par prudence envers celui qui allait le remplacer.

Le gouvernement de la défense nationale s’y laissa prendre à son tour, et conféra à M. Trochu la présidence du conseil et la direction des opérations militaires. — Il n’appartenait, du reste, qu’à ces républicains en doublé, qui avaient laissé partir librement de France, la régente et tous les souteneurs gavés de l’Empire, de choisir, par dessus le marché, pour chef de la République un général désigné par l’Empereur — sans nerf, sans initiative, sans convictions ; les trois Jules et leurs collègues ne pouvaient enfanter que de ces compromis ridicules et funestes qui ne tuent qu’aux trois quarts ce qu’il faudrait tuer en étouffant à moitié ce qu’ils voudraient faire vivre.

C’est à partir de ce moment que le général Trochu se révéla dans toute la splendeur de son entêtement et de sa nullité. —