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L’EXODE

leur déchéance, et, bien résolue à ne point se résigner au rôle ingrat de garde-malade, elle attendit l’occasion de reprendre sa liberté…

Philippe trouva le musicien alité dans une petite chambre, la moustache tombante, le regard fiévreux, ses longs cheveux noirs collés par la sueur :

— Ça ne va donc plus ?

Axel se souleva sur un coude et, se tournant vers la chambre voisine, mit un doigt sur ses lèvres avec une expression d’égarement.

Sous la portière de peluche amarante, Philippe aperçut le bas d’une robe et une valise sur le plancher couvert de papiers répandus.

Bientôt il entendit une voix claire donner des ordres à quelqu’un, dont le pas hésitant et lourd butait sur les marches de l’escalier. Une porte se ferma ; un parfum se répandit avec le souffle d’air qui remua le rideau, et Axel regarda Philippe, en essayant un pénible sourire :

— Elle est partie !… Tu viens trop tard, mon vieux.

— Mais pourquoi ne m’as-tu pas écrit ?

— J’en avais chargé madame Fontanet. Elle est venue me voir, il y a deux jours… D’ailleurs, à quoi bon ? Ma femme était bien décidée…

Voyant qu’Héloir fronçait les sourcils, le malade leva la main pour arrêter l’injure qu’il devinait prête à jaillir :

— Que veux-tu ?… C’est la vie. Assieds-toi, je vais t’expliquer.