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L’EXODE

encore, et les femmes le considéraient, inquiètes, sachant combien il souffrait à se séparer de son chien. Mais la jeune fille prévint toute objection futile. Il parut à son sourire que l’allusion au rang de sa famille avait touché sa fière délicatesse :

— Monsieur a raison, dit-elle, adressant à Philippe un regard dont il comprit la gratitude.

Et le vieux eut un geste vague, dont Héloir prit occasion pour lui serrer la main.

Le jour suivant, il conduisit cette famille à la gare, et, sur le quai, en attendant l’arrivée du train, la jeune fille s’enhardit à lui parler, obéissant à la sympathie qui les attirait l’un vers l’autre.

— Je n’oublierai jamais votre complaisance. Que d’ennuis vous a causés notre pauvre chien !

— Oh ! si peu !

— Non, grand-père m’a dit… Et vous venez de Bruxelles ?

— Oui.

— Nous aussi.

— Vraiment ?… Peut-être, après la guerre, aurai-je le plaisir de vous revoir ?

— J’en serais bien heureuse ! fit-elle avec un beau sourire de franchise et d’amitié.

Puis elle rejoignit son grand-père, qui portait la cage du perroquet.

Lorsque le train s’éloigna, la jeune fille parut à la portière, et, retenant le bord de son chapeau, elle fixa sur Philippe un long regard qui se perdit au loin.