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TROISIÈME PARTIE

en voyait courir vers la place, d’autres s’enfuir vers les remparts.

— Eh bien ! fit le docteur Claveaux, en s’approchant d’un groupe de commères, que signifie tout ce remue-ménage ?

— Ah ! monsieur le docteur ! Vous ne savez pas ?

— Mais non. Qu’y a-t-il ?

— On dit que les Allemands sont à la porte de Dixmude !

— Allons donc ! Qui vous a conté cela ?

— On les a vus, monsieur le docteur. Le bourgmestre vient de passer avec son écharpe !

— Jésus, Maria !

— Regardez tout ce monde qui court les voir.

Après un moment de stupeur, Philippe et Sylvain se regardèrent. La première pensée de Philippe fut de se sauver à travers champs, de rejoindre Marthe et Lysette, afin de les soustraire au danger. À la réflexion, il comprit que c’était impossible. Les Allemands, peut-être, entouraient la ville ; sa fuite semblerait suspecte ; il valait mieux rester.

L’exemple des commères le rassurait d’ailleurs. Elles paraissaient moins effrayées qu’avides de spectacle et d’émotion. Depuis l’entrée de l’ennemi à Bruxelles, en cortège d’apparat, l’épouvante des civils s’était un peu calmée. Toutefois, les gens des campagnes, chassés par l’invasion, parlaient des Allemands avec une telle horreur, qu’au seul bruit de leur approche les bourgeois d’Ypres eussent quitté la ville. Mais il n’était plus