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TROISIÈME PARTIE

— Oh ! ceci est bien mieux !

Yvonne dit cela avec une déférence qui ressemblait à de la vénération.

Jeanne intervint d’un petit air supérieur :

— On voit que vous arrivez de Bruxelles !

Et Mme Claveaux s’empressa d’ajouter :

— Prenez garde, monsieur Héloir ! Ne médisez pas de leur couvent, sinon elles vous en défileront l’histoire, y compris Jacques II, le drapeau de Ramillies et la dentelle de Marie Stuart.

— C’est que notre couvent ne date pas d’hier ! reprit Jeanne, avec un redressement de la taille, qui fit trembler sa médaille d’argent.

— Croiriez-vous, dit Yvonne, que notre mère abbesse est ici depuis plus de cinquante ans ?

— Vraiment ?

— Comme je vous le dis ! Elle n’a jamais vu un train, ni une auto, ni une bicyclette !

— C’est déplorable.

— Oh ! si peu, fit Mme Claveaux, qui ne manquait pas d’esprit.

Les petites continuèrent, d’un accent pénétré :

— Nous l’apercevons parfois à la chapelle.

— Rarement ?

— Oui, très rarement. C’est la mère prieure qui dirige le pensionnat.

— Il faut savoir que les religieuses ne sortent jamais. Une fois entrées, c’est pour la vie.