Page:Torcy (Blieck) - L'exode, 1919.djvu/111

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
L’EXODE

— Voyons, mon oncle, soyons sérieux ! Il s’agit du pain de Marthe et de Lysette !

Le ton décidé de Philippe intimida M. Grassoux, qui se grattait le menton, en baissant ses lourdes paupières. Il parut réfléchir, d’assez mauvaise humeur, et, tout en cherchant à « rouler » son neveu, il se remit à marcher, le menton dans la main :

— Vous voilà bien !… toujours le même… le nez dans les nuages… et pas pour deux sous de sens pratique ! Encore, si vous étiez venu quinze jours plus tôt.

— Pou vais-je prévoir les événements ?

— Et moi ?

— Je ne vous le reproche pas… mais j’avais confiance dans votre sens pratique ; c’est pourquoi je vous ai laissé la direction de mes affaires d’argent.

— Bon, bon ! fit l’industriel, qui se montra vexé. Ce n’est pas le moment de nous chercher querelle… Pensons d’abord à Lysette. Qu’allez-vous en faire ? Vous ne pouvez la laisser à la merci des Allemands.

— C’est facile à dire… que voulez-vous que je fasse d’elle ? Je l’enverrais bien à La Panne, chez les Forestier. Mais il ne me reste qu’un billet de mille. Et pas moyen de le changer !

— Si je prenais Lysette avec moi ?

— Je n’osais vous le demander, mais j’en serais bien heureux.

Voyant le visage de Philippe s’éclairer, M. Grassoux en prit occasion pour terminer en douceur l’épineuse affaire du remboursement :