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trouvé ! qu’il se présente à d’autres portes ! Ici l’heureux repousse le malheureux, le pauvre rejette le pauvre, la famille bénie rebute l’infortuné sans famille… Ah ! mes frères, mes chers frères ! quoi ! si peu de temps sur la terre, et en méconnaître ainsi l’emploi ! Si peu d’occasions de pratiquer des vertus, et laisser infructueuses les plus douces, les plus belles ! Le sublime exemple d’un maître divin qui relève avec bonté une femme adultère ; et, chez d’obscurs mortels, tant d’orgueil, tant de dureté à rabaisser un jeune homme pur et honnête !

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« Je vous ai parlé durement, mes chers paroissiens, et je ne suis qu’un pécheur comme vous. Pardonnez-moi. Après tant d’années que j’ai dû vous taire ces paroles, elles s’échappent de mes lèvres avec trop peu de mesure, et vous pleurez… Ah ! laissez couler vos larmes ; elles ne vous seront pas stériles, et, pour moi, elles me sont douces. En coulant sur mon cœur elles y lavent l’amertume qu’y avaient amassée de longs froissements soufferts dans le silence ; elles y laissent l’espoir que désormais vous saurez voir dans le pauvre, dans le misérable, dans l’enfant trouvé, l’ami de Jésus, l’hôte qu’il vous envoie, l’enfant qu’il recommande à votre amour.

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« Que si tel devait être le fruit de mes paroles, j’en regretterais peu la rudesse, et bien plutôt je bénirais Dieu de leur avoir prêté cette salutaire efficace. Alors, comptant que les promesses faites à la charité vous sont assurées, je verrais s’approcher avec moins d’anxiété le terme de ma carrière… Ô mes bien-aimés paroissiens ! entrons sans délai dans les voies du salut,