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— Vous m’aviez promis, mademoiselle, lui dit le peintre, de me fournir un croquis de l’endroit de votre parc où monsieur votre père désire être placé.

— J’y ai pensé, monsieur, répondit-elle ; il est dans la voiture. Puis, s’approchant de la fenêtre : — John ! bring me my album, if you please… Mais je m’aperçois que John n’y est plus, reprit-elle en souriant.

En effet, ses gens, ayant laissé un pauvre diable auprès des chevaux, se récréaient dans quelque café du voisinage. — Je vais y aller, dit le peintre… Mais je l’avais précédé, et déjà je remontais l’escalier, imprimant mes lèvres sur l’album de la jeune miss. J’espérais parvenir jusqu’à la porte de l’atelier, et, de là, entrevoir sa figure ; mais je rencontrai le peintre en chemin : — Grand merci ! vous êtes, ma foi, le plus charmant garçon que je connaisse. Et il prit le livre de mes mains.




Je retournai à mon poste plus tranquillement que je ne l’avais quitté, et j’eus grand tort ; j’avais perdu des paroles dont chacune avait un prix inestimable.

— …… Le complaisant enfant ! Il sait donc l’anglais ? — Fort bien. C’est lui qui d’ordinaire me sert de truchement auprès de vos compatriotes..... Un aimable jeune homme ! Il est fâcheux qu’il ne soit pas destiné à devenir un artiste, comme l’y porteraient ses goûts et ses talents…

Le peintre s’interrompit ; puis, s’étant levé : — Je veux vous montrer..... Voici ! c’est un croquis qu’il fit un jour à cette fenêtre..... le lac, un morceau de la prison… Ce mauvais chapeau suspendu à portée des passants, pour quêter l’aumône, indique la présence du