Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/469

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment, qui se compose de deux tables, de quatre chaises et d’une cafetière. Plus les intérêts sont petits, plus ils paraissent gros à qui n’en a pas d’autres ; et c’est ainsi que tant de bonnes femmes, cuisinières ou portières, lavandières ou tricoteuses, trouvent que la vie est courte parce qu’on n’a jamais tout dit.

C’est dans cette journée que nous traversons les fameuses plaines de Marengo. Un homme nous montre du bout du doigt l’espace qu’occupaient les armées. Le ciel veuille que ce soit bien là ! C’est d’ailleurs un admirable champ de bataille, et l’on ne saurait concevoir une place plus nette et plus commode pour s’entre-tuer avec avantage. Bientôt les mêmes feux du soleil dorent cette plaine funèbre, et nous poussons vers Novi par un crépuscule délicieux de calme et de fraîcheur. Nous y sommes hébergés dans un hôtel à virevoûtes et escaliers tournants, archifabolo et aceto que je vous dico.

Cette nuit, le voyageur Gail rêve qu’il frappe, qu’il fait le moulinet, qu’il brise et piétine… et le voyageur David, son compagnon de lit, aimerait qu’il changeât de rêve.