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passé, nous dit un naturel. — Et pourquoi ? — Parce qu’il a fallu que les communes s’imposassent à son sujet ; et je vous réponds que ça coûte ! — Quoi ! voudriez-vous donc vous passer d’évêque ? — Pas absolument, mais avant, on vivait bien sur celui de Moutiers ! L’on n’avait que cette montagne à passer pour avoir ses dispenses, et pas tant de carillons ! »

Telles sont les aventures de cette matinée, au bout de laquelle nous faisons halte et buvette à Saint-Michel, en même temps qu’une huitaine de messieurs qui, à la chère qu’ils font, nous ont tout l’air d’être de fins gourmets. Obsédés que nous sommes du fumet de leurs sauces et du parfum de leurs grives, très-certainement notre modeste picotin de fromage et de fruits nous semble moins qu’à l’ordinaire exquis et somptueux. Au fait, il en va toujours ainsi, et sans le voisinage d’un plus riche, qui donc se douterait qu’il est pauvre ?

Mais à peine avons-nous quitté Saint-Michel, que Voici bien une autre affaire ! Le char de M. de Saint-G***, ayant pris les devants, est cerné, arrêté, envahi par deux bons curés qui, très-sérieusement, prétendent l’occuper, et, aux prises avec ces amateurs, le cocher a grand’peine à leur tenir tête, lorsque nous arrivons sur les lieux. Les deux curés alors se désistent sans mot dire de leurs prétentions, et, rouvrant leur bréviaire, ils passent outre, ruisselants de sueur et blanchis de poussière.