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les roses de l’émotion colorent son visage. Tout à l’heure les fumeurs nous atteignent à leur tour, et c’est alors un entortillement laborieux, des bouffées ad hominem et silence des deux parts, jusqu’à ce que les deux kyrielles enfin détortillées l’une de l’autre aient repris chacune son indépendance d’entretien et sa liberté d’allure. Voici devant nous le roc perché, derrière la tempête et la nuit, et sur nos têtes le quatrième seau qui s’ouvre.

En pareil cas on s’impermée si l’on peut, on s’arrête si l’on veut, ou encore, et c’est le meilleur parti à prendre, on renonce à toute espèce de lutte et l’on se laisse rincer. En deux minutes tout, hors l’intérieur du havre-sac, est criblé, percé, jusqu’à votre mouchoir de poche, jusqu’au passe-port et aux billets de banque, si vous n’avez pris soin de les imperméer avec soin dans les profondeurs du portefeuille de confiance. Mais aussi, une fois dans cet état, l’agrément, c’est que, n’ayant plus rien à perdre, vous défiez les cataractes du ciel, vous bravez les fouettées de la pluie, et, semblable à ces rocs qui, solidement établis dans le lit d’un torrent, laissent l’onde mugir et les bouillons faire leur vacarme, vous marchez libre et insoucieux au milieu des folles criailleries de la tempête et