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en faut pour traiter avec les forains, vendre leurs vaches ou écouler leurs fromages. Et s’il leur tombe sous la main des touristes comme nous autres, dont l’un glotte germain, l’autre toscan ou picard, pour mieux s’y prendre alors, ils polyglottent à chacun un mélange de leurs trois idiomes, et c’est à n’y plus rien comprendre ni en gros ni en détail. Au fond, ce n’est là que la caricature de ce qu’est la Suisse sous le rapport de la langue : une agglomération de dialectes d’emprunt qui s’y allèrent indéfiniment sans pouvoir aller jusqu’à se détacher de leurs souches respectives pour former un idiome national. Puis, à côté de ces dialectes bâtards, ci et là des patois indigènes et le romunsch cantonné dans les Grisons, où, resserré entre l’italien et l’allemand, il vit là de sa vie propre, comme fait en Valais, resserré entre les noyers et les mélèzes, ce pin d’Italie qui croît non loin de Sierre sur une chaîne isolée de morraines ocreuses.