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avec laquelle ils remplissent toutes les conditions de leur rôle, et l’on reconnaît bien ici que la foi toute fruste est encore autrement habile que l’art le plus raffiné pour vivifier l’imitation et pour l’empreindre d’un puissant caractère.

Comme nous venons d’arriver nous-mêmes dans la prairie, une députation d’anciens s’approche et nous convie à passer aux places d’honneur. C’est le premier banc. Nous nous y rendons tous, et Rayat aussi, qui se rengorge, et de ce qu’il joue l’étranger de marque, et de ce qu’il se trouve être le drogman chargé de nous interpréter les littératures de la chose. Là où finit notre file commence celle de la société de Brigg. Ce sont des messieurs barbus, à sous-pieds, en paletots, et conformes de tout point à ces messieurs qu’on voit gravés, coloriés et collés contre la paroi des boutiques de tailleurs ; tandis que les dames, jeunes et vieilles, portent le costume valaisan dans toute sa rigueur de formes et de coupe, mais aussi dans toute sa richesse fashionable d’étoffes, de couleurs et de broderies. Au parasol de madame T… les leurs font suite, roses, verts, violets, et autour, et derrière, tout reluit, tout éclate sous les feux d’un soleil splendide. La toile se lève enfin, et Peter Joseph Lomatter, en costume de magistrat, déclame avec une lenteur composée un long prologue en vers.

Nous ne suivrons pas la représentation dans ses détails, mais quelques traits, les uns de mœurs, les autres qui tiennent au spectacle et à la mise en scène, nous restent à noter. Parmi les premiers, oublierons-nous de raconter que, dès après le prologue et ensuite entre les actes, les anciens arrivent, porteurs de plateaux chargés les uns de verres de vin, les autres de pain bis et de mouton cru ; puis, se divisant la besogne, ils passent entre les bancs et défilent devant chacun en l’invitant à se servir sur le pouce une ration à son gré ? Pour nous, nous avons trouvé à cette rustique offrande quelque chose de singulièrement aimable et de bien généreusement hospitalier ; et c’est moins sans doute de la délicieuse saveur des mets que du charme qui est toujours attaché aux procédés de cette sorte que nous nous sommes régalés en mangeant notre quartier de mouton cru. Mais, derrière nous, il en allait différemment, et ces familles parties de bonne heure, venues de loin, mangeaient avec un légitime appétit ce que nous ne faisions que goûter avec reconnaissance. Plus tard, les mêmes anciens circulent pareillement en présentant une seule fois, et sans prière ni instance, une assiette d’étain sur laquelle chacun dépose ou ne dépose pas un ou quelques batz destinés à défrayer la commune d’une partie de