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mont Rose et du Cervin marquent le point de plus grand écartement ; puis, fléchissant de nouveau vers le nord, elle s’en vient lancer ses contre-forts jusque sous les murs de Brigg, à quelque distance des graviers du fleuve. De longues vallées perpendiculaires à la haute chaîne, et qui sont séparées entre elles par d’imposantes montagnes dont les cimes s’alignent en arêtes parallèles occupent l’intérieur de ce cintre. Mais, fermées qu’elles sont du côté de l’Italie, et presque sans communication entre elles, nul ne s’y engage, excepté les gens du pays, en sorte que pour le touriste elles présentent à cette heure encore tout l’attrait de la nouveauté, et aussi, à considérer les peuplades qui y vivent paisibles et ignorées, ce charme plus rare et plus attachant des vieilles mœurs, des usages traditionnels, d’une loyauté antique et d’une simplicité primitive.

Pour achever de tracer la configuration générale de ces deux chaînes si voisines et si différentes, celle des Alpes bernoises et celle du mont Rose, nous ajouterons ici quelques traits encore. Aussi bien est-ce un plaisir d’intelligence et un vif amusement d’écrivain, que de reconnaître et d’esquisser ces grandes physionomies de contrées, que d’entrevoir, dans ces colossaux accidents d’un coin de la nature terrestre, la raison des assemblages d’hommes, la cause ici préservatrice des mœurs et de la paix, là génératrice de la richesse ou de la pauvreté, du contentement ou du malaise, du calme salutaire des âmes simples ou de l’inquiète ambition des esprits façonnés aux désirs avides. Plus que tout autre pays la Suisse prête à cette intéressante et philosophique étude, et il appartiendrait à un sage d’y consacrer sa vie ; mais les sages sont rares plus que les touristes, et de même qu’aujourd’hui, voir un pays, c’est le parcourir hâtivement un itinéraire à la main ; étudier des peuplades, c’est compiler hâtivement ce que d’autres en ont écrit. Ainsi va se perdant la vraie science, à la fois pratique par la méthode, élevée par le but ; ainsi vont s’échangeant contre des formules stériles les fécondes leçons de l’observation ; ainsi l’histoire elle-même s’appauvrit à mesure qu’elle se perfectionne, pour n’être plus bientôt qu’une escrime de doctrines et de systèmes sans action bienfaisante comme sans base certaine.

Ce qui fait que les deux côtés de la vallée du Rhône présentent, quoique si voisines l’une de l’autre, des caractères bien différents, c’est que, des deux chaînes qui l’enserrent, l’une, aisément franchissable, permet au colon indigène de se transporter dans l’espace de quelques heures sur le revers bernois, au milieu des grasses prairies, jusqu’aux éclatants rivages de Thune et d’Interlaken, là où l’attirent à la fois et l’abondance des mar-