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naissent au moins la conception chrétienne de la vie. Ainsi, dans ce cas, toute la profondeur de l’influence dégradante du principe actuel, du principe militaire et gouvernemental, éclate dans cet état d’âme qu’il imprime aux malheureux représentants des susdites classes supérieures civilisées, qui sont doués d’une certaine finesse de perception, et surtout d’une capacité, pas encore tout à fait usée, de distinguer le bien du mal. Toute l’horreur de cette situation tragique dans laquelle se trouve notre société se montre avec la plus grande force, non dans la contemplation grossière d’un capitaine sauvage, irresponsable, non dans les actes bestiaux de soldats tout à fait abrutis et même irresponsables mais dans ceci : que les hommes sensibles, instruits, souvent bien pensants, qui savent ce qui se passe chez les Doukhobors, peuvent tranquillement se mettre à table, se coucher, caresser leurs enfants, sans dire le mot qui dépend d’eux et qui pourrait aider à faire cesser les souffrances de leurs frères persécutés.

Comment ne se révoltent-ils pas de ce qui se fait en leur nom ? Comment ne se hâtent-ils pas de donner des ordres pour faire cesser ces horreurs ? Comment peuvent-ils