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nait en nous la place du cœur, de la raison, de la conscience. On nous a tellement convaincus de la nécessité de l’État et de la sainteté de l’Église, que nous ne pouvons pas même nous représenter la vie sans eux, et tout ce qui peut les détruire ou même les ébranler nous paraît être le mal le plus dangereux. Et, ce qu’il y a de plus terrible, nous sommes tellement pénétrés de cette conviction, que si une manifestation quelconque, du bien ou de l’amour, menace de nuire à l’état ou à l’Église, nous croyons de notre devoir de donner la préférence à la sécurité de ces institutions et de chasser le bien, l’amour, en persécutant, en tourmentant et en immolant ceux qui portent atteinte à nos idoles. Nous sommes arrivés à ce point que pour servir l’institution humaine, très douteuse, que nous avons acceptée, nous sommes prêts à opprimer en nous la seule chose qui soit sûre dans la vie, la voix de Dieu dans notre conscience.

En outre, cette voix, que nous entendons seulement dans la profondeur même de notre âme, est si étouffée par les soucis de la vie, par les considérations pratiques, par ce brouhaha compliqué, elle est si douce et si modeste, et tout ce qui a rapport à l’État