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car chacun n’a qu’à se rappeler une nuit passée dans un tel sommeil sans rêves et à la comparer aux autres jours et aux autres nuits, avec leurs craintes, leurs inquiétudes et désirs non satisfaits, éprouvés tant en réalité qu’en rêves, et je suis persuadé que personne ne trouvera beaucoup de jours et de nuits plus heureux que les nuits sans rêves. De sorte que, si la mort est un tel sommeil, je la considère, quant à moi, comme un bienfait. Si elle constitue le passage d’un monde dans un autre, et s’il est vrai que tous les hommes sages et saints morts avant nous s’y trouvent, pourrait-on espérer un bonheur plus grand que de vivre parmi ces êtres ? J’aurais voulu mourir, non pas une fois, mais cent fois, pourvu que je puisse pénétrer dans cet endroit.

« De sorte que ni vous, juges, ni les hommes, en général, ne doivent craindre la mort, me semble-t-il ; ils n’ont qu’à se souvenir d’une chose : pour un homme de bien, il n’y a pas de mal ni dans la vie, ni dans la mort. » (Extrait du discours de Socrate devant le Tribunal.)

4. Celui qui voit le sens de la vie dans le perfectionnement spirituel ne peut croire à la mort ; il ne peut croire à l’arrêt de ce perfectionnement. Ce qui se perfectionne ne peut disparaître, cela ne peut que se modifier.

5. La mort est l’interruption de la conscience dont je vis actuellement. La conscience de cette vie s’arrête ; je le vois sur ceux qui meurent. Mais que devient ce qui était la conscience ? Je ne le sais pas, et je ne puis le savoir.