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n’offenser personne, alors qu’eux-mêmes forcent les gens, non par la douceur, mais par la violence, à vivre comme ils veulent ; c’est comme s’ils disaient : faites ce que nous disons, mais non ce que nous faisons. On peut craindre ces gens-là, mais on ne peut pas avoir foi en eux.

II. — La lutte contre le mal par la violence est inadmissible parce que les hommes conçoivent le mal différemment.

1. Etant donné que chaque homme détermine le mal à sa manière, il semblerait évident que si chacun combat le mal par la violence, cela ne peut qu’augmenter le mal au lieu de le diminuer. Si Jean estime que Pierre n’agit pas bien et se croit en droit de faire du mal à Pierre, celui-ci prend le même droit de faire du mal à Jean, et le mal ne fait qu’augmenter. Mais chose étrange : tout en pénétrant les lois du mouvement des étoiles, les hommes ne comprennent pas une vérité aussi évidente. Pourquoi ? Parce qu’ils croient que la violence est bienfaisante.

2. La doctrine conformément à laquelle l’homme ne peut et ne doit jamais faire violence pour arriver à ce qui lui semble bien, est juste pour cette simple raison que tous les hommes n’entendent pas le bien et le mal de la même façon. Ce que l’un considère comme mal est douteux (d’autres le considèrent comme bien), tandis que la violence dont il use afin de supprimer le mal : coups, blessures, entraves à la liberté, mort, est incontestablement un mal.