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qu’Olénine ne le prît pour un simple Cosaque et voulait de prime abord le pénétrer de son importance.

« C’est notre Nemrod d’Égypte, dit-il d’un air satisfait en montrant Jérochka ; c’est un grand chasseur devant l’Éternel. Il est propre à tout. Vous le connaissez déjà ? »

Diadia Jérochka, le regard arrêté sur sa chaussure humide, branlait la tête et paraissait frappé des connaissances du khorounji.

« Nemrod d’Égypte ! murmura-t-il, que n’invente-t-il pas !

— Nous allons ensemble à la chasse, dit Olénine.

— C’est ça, c’est ça, reprit le khorounji, et moi, j’ai une petite affaire à régler avec vous.

— Je suis à vos ordres.

— Vous êtes noble, commença le khorounji ; je suis aussi officier, nous pourrons nous entendre, comme on le fait entre gentilshommes. (Il s’arrêta et sourit en regardant le jeune homme et le vieux Cosaque.) Si vous désirez mon consentement à moi, car ma femme a l’intelligence obtuse de sa condition et ne vous a pas compris l’autre jour… Mon logement aurait pu être loué à l’aide de camp du régiment à raison de six monnaies, sauf l’écurie, et comme gentilhomme je puis ne pas y consentir. Je suis officier, et comme tel je ferai mes conditions avec vous.

— Il parle éloquemment », marmotta le vieux.

Le khorounji parla encore longtemps dans le même style, et Olénine finit par comprendre, non sans peine, qu’il voulait six roubles par mois pour sa cabane ; il y consentit volontiers et proposa un verre de thé à l’hôte, qui refusa.

« Vu nos absurdes préjugés, dit-il, nous croyons pécher en nous servant d’un verre qui ne nous appartient pas. Certainement, grâce à mon éducation, je devrais être au-dessus du préjugé, mais ma femme, vu la faiblesse de son sexe…

— Eh bien ! désirez-vous du thé ?

— Je vous en prie, mais je demanderai mon propre