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puisque Apollon Serguéitch nous laisse libres, nous tirerons au sort, comme l’autre fois.

Tous y consentirent. Kraut coupa avec soin quelques petits carrés de papier, les roula et les jeta dans une casquette. Le capitaine débita quelques plaisanteries et profita de l’occasion pour demander au colonel du vin, « afin de se donner du courage », ajouta-t-il. Dédenko avait l’air sombre, Volodia souriait, Tchernovitzky prétendait qu’il serait désigné par le sort ; quant à Kraut, il était parfaitement calme.

On offrit à Volodia de tirer le premier, il prit un des billets, le plus long, mais il le changea aussitôt contre un autre, plus petit et plus mince, et, le déroulant, il lut le mot « aller ».

« C’est à moi, dit-il en soupirant.

— Eh bien, que Dieu vous garde ! Ce sera votre baptême du feu, lui dit le commandant en regardant avec un bon sourire la figure émue de l’enseigne, mais faites vite, et, pour que ce soit plus gai, Vlang ira avec vous à la place de l’artificier. »


XX


Vlang, enchanté de sa mission, courut s’habiller et revint aussitôt aider Volodia à faire ses paquets, en lui conseillant de prendre son lit, sa pelisse, un vieux numéro des Annales de la Patrie, une cafetière avec une lampe à esprit-de-vin et autres objets inutiles. Le capitaine, à son tour, engagea Volodia à lire, dans le Manuel à l’usage des officiers de l’artillerie, le passage concernant le tir des mortiers et d’en prendre immédiatement copie ! Volodia se mit aussitôt à la besogne, heureux et surpris de sentir que la terreur du danger, la crainte surtout de passer pour un poltron étaient moins fortes que la veille ; les impres-