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— Nous sommes prêts à faire de notre mieux, Votre Noblesse, dirent plusieurs voix à la fois.

— Ils sont donc très hardis ?

— Terriblement hardis », répondit le tambour à mi-voix, mais de façon à être entendu et s’adressant à un autre soldat, comme pour justifier son chef d’avoir employé cette expression et persuader à son camarade qu’elle n’avait rien d’exagéré ni d’invraisemblable.

Koseltzoff quitta les soldats pour se rendre auprès des officiers dans la caserne.


XVI


La grande chambre de la caserne était remplie de monde, d’une foule d’officiers de marine, d’artillerie et d’infanterie ; les uns dormaient, les autres causaient assis sur un caisson ou sur l’affût d’un canon de rempart ; le groupe le plus nombreux des trois, assis sur leurs bourkas étendues par terre, buvaient du porter et jouaient aux cartes.

« Ah ! Koseltzoff ! te voilà revenu, bravo ! et ta blessure ? » dirent différentes voix parties de divers côtés.

Ici aussi on l’aimait et l’on se réjouissait de son retour.

Après avoir serré la main à ses connaissances, Koseltzoff se joignit au groupe brillant des joueurs. L’un d’eux, d’un extérieur agréable, brun, maigre, avec un long nez, sec, une grande moustache qui empiétait sur les joues, taillait la banque de ses doigts blancs et minces, à l’un desquels était passée une grande bague chevalière : il semblait ému et jetait les cartes avec une négligence affectée ; à sa droite, moitié couché et accoudé, un major à cheveux gris pontait et payait chaque fois un demi-rouble avec un calme exagéré ; à sa gauche, accroupi sur ses talons, un officier à la figure rouge et luisante plaisantait et souriait