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jusqu’au grade de colonel, tandis qu’ici Todtleben, de lieutenant-colonel, est devenu général en deux ans. Et si je suis tué, eh bien alors, que faire ?

— Comme tu raisonnes, dit le frère aîné en souriant.

— Et puis, ce que je viens de te dire n’a pas d’importance ; la raison principale, — et il s’arrêta hésitant, souriant à son tour et rougissant comme s’il allait dire quelque chose de très honteux, — la raison principale, c’est que ma conscience me tracassait ; j’éprouvais des scrupules de vivre à Pétersbourg pendant qu’ici on mourait pour la patrie. Je tenais aussi à me retrouver avec toi, ajouta-t-il encore plus timidement.

— Tu es un drôle de corps ! lui dit son frère, sans le regarder, en cherchant son étui à cigares. Et je regrette que nous ne puissions rester ensemble.

— Voyons, je t’en prie, dis-moi la vérité : les bastions, c’est terriblement effrayant ?…

— Oui, au commencement, puis on s’y fait, tu verras !

— Dis-moi aussi, je t’en prie,… crois-tu que Sébastopol soit pris ?… Il me semble que jamais pareille chose n’arrivera…

— Dieu seul le sait !

— Oh ! si tu savais comme je suis ennuyé… Figure-toi mon malheur : en route, on m’a volé différentes choses, entre autres mon casque, et je me trouve dans une position épouvantable ; comment ferai-je pour la présentation au chef. »

Vladimir Koseltzoff, le cadet, ressemblait beaucoup à son frère Michel, autant du moins qu’une églantine qui s’entr’ouvre peut ressembler à une églantine défleurie. Il avait aussi également les cheveux blonds, mais épais et bouclant sur les tempes, tandis que sur sa nuque blanche et délicate s’égarait une longue mèche, signe de bonheur, au dire des vieilles bonnes. Un sang généreux et jeune colorait subitement à chaque impression de son âme son teint, habituellement mat. Sur ses yeux, semblables à ceux