Page:Tolstoï Les Cosaques.djvu/142

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Olénine reconnut Nazarka et garda le silence, ne sachant que dire ni que faire.

« C’est joli ! J’irai chez le chef de la stanitsa, chez le père ; ils sauront tout. Ah ! la belle a trop peu d’un seul galant !

— Que veux-tu dire ?… Que te faut-il ? articula enfin Olénine.

— Rien du tout, je ferai mon rapport. »

Nazarka parlait haut avec intention.

« Est-il avisé, le porte-enseigne ! »

Olénine pâlissait, éperdu.

« Viens ici ! »

Il saisit le bras du Cosaque avec violence et l’entraîna vers sa cabane…

« Il n’y avait rien,… elle ne m’a pas laissé entrer… Elle est honnête !

— Nous verrons cela !

— Je te payerai… Attends ; tu verras. »

Nazarka se tut. Olénine courut à sa chambre et en porta dix roubles.

« Il n’y avait rien… Tout de même je suis coupable ; je te paye, mais, au nom de Dieu, que personne n’en sache rien ! Il ne s’est rien passé…

— Dieu vous bénisse ! » dit Nazarka en riant, et il s’éloigna.

Il avait été envoyé par Lucas pour préparer une cachette à un cheval volé ; passant devant la maison du khorounji, il avait pris l’éveil. Il retourna à sa sotnia et se fit fort, vis-à-vis de ses camarades, d’avoir adroitement extorqué dix roubles.

Le lendemain, Olénine remarqua que le khorounji ne se doutait de rien. Il n’adressa pas la parole à Marianna, qui riait sous cape en le regardant. Il passa de nouveau la nuit à errer dans la cour. Il alla à la chasse le surlendemain, et passa la soirée chez Béletsky pour s’échapper à lui-même. Il se promit de ne plus retourner chez ses