salle, ni ce que je répondis aux questions des étudiants, ni comment j’arrivai à la maison. J’étais humilié, blessé, profondément malheureux.
Je fus trois jours sans sortir de ma chambre et sans voir personne. Je trouvais du plaisir à pleurer, comme quand j’étais enfant, et je versai des flots de larmes. Je cherchai des pistolets pour me tuer si l’envie en devenait trop forte. Je pensai qu’Iline Grapp me cracherait à la figure quand il me rencontrerait, et qu’il aurait raison ; que tel de mes camarades se réjouirait de mon infortune et la raconterait devant tout le monde ; que les bêtises que j’avais dites à la princesse Kornakof devaient nécessairement me mener là, etc., etc. Toutes les minutes de mon existence qui avaient été pénibles pour mon amour-propre me revinrent l’une après l’autre à la mémoire. Je cherchai quelqu’un à accuser de mon malheur. Je me figurai que ce quelqu’un l’avait fait exprès, j’inventai toute une intrigue ourdie contre moi, je déblatérai contre les professeurs, contre mes camarades, contre Volodia, contre Dmitri, contre papa, qui m’avait fait entrer à l’Université, contre la Providence, qui avait permis que je fusse couvert d’un tel opprobre. Finalement, sentant que j’étais fini pour toujours aux yeux de tous ceux qui me connaissaient, je demandai à papa la permission de m’engager dans les hussards ou de partir pour le Caucase. Papa était mécontent de moi, mais, en me voyant si malheureux, il me consola et m’expliqua que je n’étais pas déshonoré, que tout pourrait encore s’arranger : je n’avais qu’à entrer dans une autre Faculté.
Volodia, qui ne trouvait pas non plus mon malheur si terrible, ajouta qu’en changeant de Faculté j’aurais de nouveaux camarades, devant lesquels je n’aurais pas à rougir.
Les dames de la maison ne comprenaient pas et ne voulaient ni ne pouvaient comprendre en quoi consiste un examen ; elles me plaignaient, mais uniquement parce qu’elles me voyaient du chagrin.