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paraissait vouloir tout déraciner. Dans l’allée de tilleuls, des tourbillons de feuilles jaunies se poursuivaient ; à mesure que l’humidité les avait pénétrées et alourdies, elles s’abattaient sur le chemin détrempé, ou sur la prairie, devenue d’un vert plus sombre sous la pluie.

Je songeais au mariage de mon père et je l’envisageais au même point de vue que Volodia. L’avenir de ma sœur, de nous et de mon père lui-même ne me présageait rien de bon. J’étais révolté à l’idée qu’une étrangère et, qui plus est, une jeune femme, allait prendre tout à coup, sans y avoir aucun droit, une place dans notre vie…, et qui ?… une simple jeune demoiselle… ; et elle va prendre la place de maman ! J’étais tout triste et mon père me paraissait de plus en plus coupable. J’entendis sa voix et celle de Volodia. Ne voulant pas voir mon père en ce moment, je sortis. Ma sœur me rappela, en me prévenant que papa voulait me parler.

Il était debout dans le salon, appuyé d’une main sur le piano, et regardait de mon côté avec un mélange d’impatience et de solennité. Son visage n’avait plus l’expression de jeunesse et de bonheur que je lui avais toujours vue dans les derniers temps. Il était triste. Volodia se promenait de long en large en fumant sa pipe. Je m’approchai de mon père et lui souhaitai le bonjour.

« Eh bien ! mes amis, dit-il résolument, relevant la tête et prenant ce ton précipité tout particulier dont on dit les choses désagréables sur lesquelles il n’est plus temps de revenir. Vous savez, je suppose, que je me marie avec Eudoxie Vassilevna ? »

Il se tut un instant et reprit :

« J’avais l’intention de ne jamais me remarier après avoir perdu votre mère ; mais… (il s’arrêta quelques secondes), mais…, évidemment, le sort l’a voulu. Eudoxie est une bonne et aimable fille et elle n’est plus toute jeune. J’espère que vous l’aimerez, enfants ; elle vous aime déjà du fond du cœur ; elle est excellente. Le moment est venu