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un regard curieux dans la rue : Sema et Michel, assis chacun devant sa fenêtre, étaient occupés à battre une paire de talons. Un des petits garçons vient en courant sur le banc ou était assis Michel ; et s’appuyant sur les épaules de celui-ci, il s’écria en regardant dans la rue :

— Oncle Michel, vois un peu, la femme du marchand qui vient aussi chez nous ; elle a deux petites filles ; regarde comme il y en a une qui boite.

À peine ces mots eurent-ils frappé son oreille, que Michel, laissant son travail, se pencha vivement vers la fenêtre et dirigea sur la rue un regard d’une étrange fixité.

Sema s’étonnait. Jamais son ouvrier ne s’était inquiété de ce qui se passait au dehors et voilà que tout d’un coup il semblait comme magnétisé.

Sema regarda à son tour et vit, en effet, qu’une femme s’approchait en donnant la main à deux petites filles ; la dame était fort bien mise et les deux enfants, vêtues l’une comme l’autre d’une mante fourrée avec un fichu clair autour du cou, se ressemblaient si fort