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chargé de connaissances s’en trouve comme encombré ; il y a là plutôt un obstacle. Ce qui importe seulement, c’est le renoncement, même momentané, aux vanités du monde, la conscience du néant de l’homme au point de vue matériel, et le sentiment de la justice, toutes choses, comme le disent les Évangiles, qui se rencontrent plus fréquemment chez les enfants, chez les simples et les gens les moins cultivés que chez les autres. C’est là la raison pour laquelle nous voyons souvent les gens les plus simples, les moins savants, les moins cultivés, accepter facilement, en sachant ce qu’ils font et en toute lucidité d’esprit, la conception de la vie la plus haute, la conception chrétienne, alors que les plus savants et les plus cultivés continuent à croupir dans le paganisme le plus grossier. C’est ainsi que nous voyons, d’une part, ceux qui ont atteint le développement intellectuel le plus raffiné, placer le sens de la vie dans la jouissance personnelle ou dans le fait d’éviter la souffrance — comme Schopenhauer, cette intelligence, cet esprit cultivé entre tous ; ou bien, comme le font les évêques les plus éclairés, dans le salut de l’âme par le moyen des sacrements et de la grâce ; alors que, d’autre part, le sectaire russe, ce paysan qui ne sait qu’à moitié lire et écrire, sans qu’il ait pour cela à faire un effort quelconque de pensée, se rencontre avec les plus grands sages du monde, avec un Épictète, un